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Histoire et Esotérisme
3 décembre 2008

Yvan Le Terrible (1533-1584)

Ivan ou Jean IV fut le premier tsar de Russie. Il en fut aussi le tyran, et il surpassa, en cruautés, les Caligula et les Néron.
Sans doute le pays qu'il tenait sous son sceptre était encore à cette époque livré à la barbarie. C'était dans la dernière moitié du XVIe siècle, et la civilisation n'avait pas encore pénétré dans l'empire moscovite. Les historiens les plus favorables à Ivan IV ne manquent point de faire ressortir cet argument, et MM. Solovief et Zabiéline, dont les travaux historiques assez récents ont une grande autorité, sont d'avis qu'il faut moins se préocccuper de la moralité de ce prince que de son rôle comme agent dans le développement politique de la Russie. Quoi qu'on dise à cet égard, il demeure avéré que Jean IV, à qui ses contemporains et la postérité ont donné le nom de Terrible (en russe Grosnoï) se livra non seulement au plus odieux despotisme mais encore à la plus honteuse dissolution, et ses vices ne peuvent être excusés par les moeurs du temps, puisqu'il était doué d'une grande intelligence et qu'il unissait aux connaissances étendues une culture d'esprit peu commune. Il était instruit, éloquent ; il faisait preuve d'une grande pénétration dans les affaires. Homme de guerre courageux, législateur habile, administrateur plein de sagesse, il rendit dans la première partie de son règne, de 1533 à 1559, de grands et durables services à la Russie. Ce fut lui qui créa, lorsqu'il se fit sacrer tsar en 1547, les strelitz, qui composèrent la première armée régulière. Ce fut lui qui, après avoir pris Kazan et Astrakan, refoula les Tartares en Crimée. Dans ses démêlés avec l'Ordre teutonique, dans sa campagne en Livonie, dans sa lutte avec le roi de Pologne Etienne Bathory, qui avait pour allié la Suède, il montra une énergie digne de toute admiration.
Mais le pouvoir absolu qu'il s'était arrogé le perdit. Les 25 dernières année de son règne (de 1559 à 1584) furent, sous le rapport de la férocité, sans exemple dans l'histoire. On eût dit qu'il était atteint de folie furieuse, et de fait il se croyait persécuté par tous ceux qui l'entouraient et qu'il envoyait sans pitié au supplice. On raconte qu'il se rendait dans les prisons pour assister à la torture des condamnés. Comme Henri VIII d'Angleterre, son contemporain, il se maria un grand nombre de fois, et répudia ou tua plusieurs de ses femmes. Son fils aîné Jean, compagnon de tous ses travaux, de tous ses vices, de tous ses crimes, avait les mêmes instincts que lui. Aussi rien ne semblait pouvoir troubler l'harmonie qui régnait entre eux. Cependant un jour Jean vint demander à son père la permission de se mettre à la tête de l'armée russe pour combattre Etienne Bathory :
- Ah ! s'écria le tyran, tout à coup saisi d'une violente fureur, tu veux aussi me détrôner, toi !
Et à l'instant, il s'élance sur le tsarevitch, le frappe avec un long bâton ferré qui lui servait de sceptre, lui fait plusieurs blessures, et enfin, d'un coup vigoureux asséné sur la tête, le renverse à terre baigné dans son sang. Le jeune prince survécut peu de jours à sa blessure.Sept2008_001
Yvan le Terrible sentit alors le remord d'emparer de son âme, et sans cesser ses débauches et ses cruautés, il chercha un refuge dans une dévotion hypocrite. Sa mort fut digne de sa vie. Dans l'hiver de 1584, le monstre comprit que sa fin approchait.
"Déjà, dit l'historien Karamsine, les forces du tsar diminuaient sensiblement et le délire de la fièvre égarait ses idées. Etendu sans connaissance, il appelait à haute voix le fils qu'il avait tué ; il le voyait en imagination, il lui parlait avec tendresse... Toutefois, le 17 mars, il se sentit un peu mieux par l'effet d'un bain tiède ; il fit dire à l'ambassadeur de Pologne, alors à Mojaïsk; de se rendre incessamment à Moscou. Le lendemain, il dit à Belsky, un de ces courtisans :
"-Allez annoncer la mort à ces imposteurs d'astrologues. D'après leurs contes, c'est aujourd'hui que je dois mourir, et je sens renaître mes forces.
"- Attendez, répondirent ceux-ci, la journée n'est pas écoulée.
"On prépara un second bain dans lequel il resta environ trois heures ; ensuite il se coucha et prit quelque repos. Un instant après, il se lève, il demande un jeu d'échecs, et assis sur son lit, en robe de chambre, il arrange lui-même les pièces pour jouer avec Belsky. Tout à coup il tombe et ferme les yeux pour toujours... Les médecins accourent aussitôt et le frottent avec des essences spiritueuses pour le rappeler à la vie, tandis que le métropolitain, exécutant sans doute la volonté du tsar, à lui connue depuis longtemps, lisait sur le corps les prières des morts.
"Dans ce moment solennel, un profond silence régnait au palais. Bien que tout le monde s'attendît à l'évènement, on craignait de s'interroger à ce sujet. Ivan n'était plus qu'un cadavre ; cependant il paraissait encore redoutable aux courtisans qui le regardaient sans en croire leurs propres yeux, ni oser publier sa mort ; mais enfin le Kremlin retentit bientôt de la grande nouvelle ; on entendit crier : le tsar n'est plus ! et à l'instant, le peuple poussa des cris lamentables... A quel sentiment les attribuer ?
"Cet attendrissement prenait-il sa source dans les craintes que la faiblesse de Féodor, l'héritier du trône, inspirait sur le sort de l'Etat ?
"Etait-ce pour payer le tribut de pitié religieuse au monarque défunt, bien qu'il eût été féroce et sanguinaire ?...
"Ses obsèques eurent lieu avec une grande pompe dans l'église de Saint-Michel. Les assistants versaient des pleurs ; toutes les physionomies exprimaient l'affliction, et la terre reçut dans son sein les restes d'Ivan le Terrible ! L'opinion des hommes était muette devant le jugement de Dieu, et pour ses contemporains le rideau tomba sur la scène de son existence."

MEMOR - 1891

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